Comment sortir du cul-de-sac identitaire?

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Eric Lanthier

Cet article a été initialement publié sur les pages francophones du HuffPost Québec 

 

La lutte qui se joue entre les multiculturalistes et les laïcistes conduit inévitablement le Québec vers un vide identitaire. Ni l’un ni l’autre n’arriveront à amener les Québécois de tout horizon à être fiers de leur identité distincte et de leur société unique.

D’une part, le multiculturalisme favorise la coexistence de plusieurs cultures au sein d’une même société. D’autre part, le laïcisme vise à ce que toute manifestation de foi théiste disparaisse complètement des institutions publiques du Québec. Par définition, le multiculturalisme ne fait que noyer le patrimoine québécois comme un pan identitaire du Québec parmi une foule d’autres, tandis que le laïcisme exclut toute référence du patrimoine à des éléments religieux tels que Noël, Pâques, l’Action de grâce, la crèche, le crucifix, les chemins de croix, les cantiques traditionnels de Noël ainsi que les noms de saints qui caractérisent notre histoire toponymique. Ainsi, ni le multiculturalisme ni le laïcisme ne contribuent à ériger une société distincte, fière de son patrimoine, de son histoire et de sa spécificité culturelle.

Formes d’intolérance

Restreindre les droits des communautés culturelles et éliminer le patrimoine religieux et culturel du Québec sont, de part et d’autre, des formes d’intolérance. Dans les deux cas, on noie l’identité québécoise. Chez les multiculturalistes, on n’adhère pas à une culture commune spécifique tandis que chez les laïcistes, on s’identifie à une culture occidentale désincarnée qui fait abstraction du patrimoine religieux et culturel québécois. À l’image de l’Europe, les laïcistes québécois ne désirent pas mettre en valeur l’identité patrimoniale du Québec.

Distinction

En polarisant le débat autour d’un affrontement entre les multiculturalistes et les laïcistes, le Québec mondialise son identité en prônant les mêmes valeurs que la majorité des nations occidentalisées. En réalité, qu’est-ce qui distingue le Québec d’une autre nation occidentale? La langue? Nous ne sommes pas la seule nation francophone à travers le monde. En fait, ce qui distingue chaque individu, chaque groupe, chaque peuple et chaque nation, c’est son histoire, son patrimoine et sa culture. Renier son patrimoine est le fruit d’une nation agonisante en perte d’identité. Pourquoi la grande majorité des Québécois ne sont-ils pas en faveur de leur indépendance? Parce que rien ou presque ne distingue leur nation des autres nations occidentales. Voilà pourquoi le patrimoine du Québec doit être respecté de tous, si notre nation veut se distinguer des autres.

Héritage

Pour protéger et mettre en valeur notre patrimoine, nous devons avoir le désir et la volonté de le transmettre et de le léguer à titre d’héritage culture. À cet effet, Georges Leroux affirme : « … La culture commune d’une société constitue à la fois une responsabilité de transmission et un enjeu de renouvellement. Aucune culture ne peut se perpétuer en s’en remettant au seul processus de sa reproduction, aucune ne peut non plus survivre dans une mutation qui ne serait faite que de différences et de nouveautés. »

Le Québec, s’il veut se renouveler doit transmettre un héritage qui lui est propre. Il ne peut se reproduire à son image que s’il dispose d’une identité qui le distingue. Sinon, le Québec sera une nation occidentale semblable aux autres. Pour qu’elle soit unique, la nation québécoise doit protéger son patrimoine et parallèlement s’ouvrir à la diversité.

Patriotisme-communautarien

Le seul moyen de s’ouvrir à la diversité culturelle sans remettre en question l’identité québécoise est d’adhérer au patriotisme-communautarien, qui met en valeur, à la fois, le patrimoine initié par Jacques Cartier et Pierre Chauvin, et la diversité culturelle. Dans un Québec où le patriotisme-communautarien serait valorisé, son patrimoine historique deviendrait une référence nationale, et la diversité culturelle serait libre de s’exprimer au sein de la société civile. Si nous fêtons Noël, Pâques et l’Action de grâce, c’est parce que ces fêtes font partie de notre patrimoine. Si les musulmans peuvent célébrer le Ramadan, c’est parce qu’un Québec qui prône le patriotisme-communautarien permet à chaque communauté de foi théiste ou athéiste de s’exprimer librement. Là où le patrimoine vient trancher, c’est sur le plan de la nationalisation des célébrations, des symboles et des repères culturels. Le Ramadan ne deviendra jamais une fête nationale, et la Hanukkah ne sera jamais un jour férié parce que ces célébrations ne sont pas enracinées dans le patrimoine historique du Québec, issu de Jacques Cartier et de Pierre Chauvin.

Inspirer le respect du plus grand nombre

Le patriotisme-communautarien inspire le respect mutuel du patrimoine et de la diversité culturelle, que celle-ci soit issue de communautés de foi théiste ou de foi athéiste. C’est pourquoi le patriotisme-communautarien ne fait pas référence à la laïcité de l’État ni à sa neutralité, mais plutôt à son impartialité. Selon Nathalie Roy, « La neutralité, ça signifie que toutes les religions sont égales et que tout est permis […] La laïcité, ça signifie que l’État est au-dessus des religions. » Pour sa part, un État impartial concourt à l’intérêt général de tous ses concitoyens. Sous un régime qui met en valeur le patriotisme-communautarien, l’État est impartial et ne favorise ni ne défavorise aucun groupe. Seuls les symboles, les célébrations et les éléments culturels reliés au patrimoine de la nation ont préséance sur les autres.

Redonner un sentiment d’appartenance

Le patriotisme-communautarien est le meilleur moyen de redonner au Québécois un sentiment d’appartenance, un respect de ses traditions et la fin du cynisme à l’égard des politiciens. Cette approche met fin à la polarisation du débat entre le multiculturalisme et le laïcisme, elle met en valeur le respect identitaire, elle inspire le respect de la diversité et ne crée pas d’écart entre les croyants de foi athéiste et les croyants de foi théiste. En somme, le patriotisme-communautarien mettrait un frein au vide identitaire généré par le conflit entre le multiculturalisme et le laïcisme.

 

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