Couper les subventions aux écoles privées : une erreur de jugement

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Image: Conçue par Freepik

Cet article a été publié initialement sur la page francophone du Prince Arthur Herald

Par Éric Lanthier

Nos écoles privées témoignent haut et clair de la capacité de notre système scolaire à amener nos élèves à la réussite. Ce que le Québec a besoin, c’est de suivre leurs traces plutôt que de les affaiblir en abolissant l’aide financière qui leur est destinée. Couper les subventions aux écoles privées est une erreur de jugement.

 

On entend souvent que les écoles privées écrèment les écoles publiques. En d’autres mots, elles contribueraient à soustraire des écoles publiques les meilleurs élèves, et ce n’est pas faux. La raison pour laquelle les parents retirent leurs enfants du secteur public, c’est pour leur assurer une meilleure éducation. Il semble alors que la qualité de l’éducation au privé serait supérieure à celle du public. Certains observateurs vont même jusqu’à dire que si l’école privée amène les élèves à mieux apprendre, c’est parce qu’elle exclut les élèves en difficulté. Cette affirmation est vraie aussi, et c’est pour le mieux.

 

Viser plus haut ou niveler vers le bas

Au lieu de soustraire les subventions aux écoles privées, le ministre de l’Éducation aurait, au contraire, intérêt à encourager la réussite d’un plus grand nombre d’élèves. Si l’éducation privée génère de bons résultats, pourquoi ne pas s’en servir comme modèle pour l’éducation publique? En admettant qu’il soit intéressé à abonder dans ce sens, le Ministère devra, au préalable, répondre à la question suivante. Doit-on viser plus haut ou niveler vers le bas? S’il veut viser plus haut, l’école publique devra s’inspirer de l’école privée. Par contre, s’il veut niveler encore plus vers le bas, l’État n’aura qu’à couper les subventions à l’école privée.

 

Que faire avec les élèves moyens ou faibles?

Le système scolaire actuel part du présupposé que tout le monde apprend de la même façon, au même rythme, dans un même contexte éducatif. Or, c’est tout le contraire qui est vrai. La preuve en est que, dès que le secteur public s’est mis à imiter le secteur privé en mettant sur pied des écoles vocationnelles, à différentes orientations telles que sports-études, arts-études, les écoles internationales ou autres, on a été à même de constater un dépassement scolaire comme jamais auparavant. Le niveau de motivation a grimpé chez les élèves, et les parents ont manifesté un désir de s’investir davantage. Dans un tel contexte, qu’a-t-on à offrir aux élèves moyens et à ceux qui souffrent de problèmes d’apprentissage? Eh bien, quoi de mieux que de leur offrir une éducation adaptée à eux, à leurs besoins. La clé n’est pas d’uniformiser le système, qui lèse les plus faibles autant que les plus forts. Bien au contraire, il doit s’adapter à sa clientèle. Est-ce qu’un physiothérapeute soigne le dos de la même manière que les bras, le cou ou les jambes? Nous savons pourtant que chaque membre du corps a des fonctions qui lui sont propres et que chacun a ses limites. Un traitement est efficace pour un membre, mais ne le sera pas nécessairement pour un autre. Les lunettes ne sont efficaces que sur les yeux, elles ne sont d’aucune utilité sur les coudes.

 

Le problème ne se situe pas sur la présence d’élèves moyens ou faibles dans nos écoles publiques. Non, chacun doit avoir sa place, bien sûr. Le problème se trouve plutôt dans l’intégration à tout prix de tout le monde dans la même classe, sans considération des différences de profils d’apprentissage. Que deviendraient les courses de Formule 1 si l’on intégrait les berlines, les voitures sous-compact, comme les modèles Smart ou Mini, ainsi que les cyclomoteurs de 49 cc? On finirait inévitablement par limiter la vitesse des Formules 1 à 50 km/h. C’est exactement ce genre de solution que l’État a choisie pour l’école publique. On veut garder nos élèves forts dans les salles de classe régulière et ainsi, on leur demande de ne pas donner tout ce qu’ils ont, tandis qu’aux élèves plus faibles, on exige d’eux qu’ils donnent ce qu’ils n’ont pas.  Il est là, le problème.

 

Pas de coupures, plus de compétition

Si l’école publique veut récupérer les élèves du privé, elle doit leur offrir un service équivalant à celui du secteur privé. Puisque celui-ci répond aux besoins d’une certaine clientèle, le secteur public devra ouvrir davantage d’écoles compétitives pour être en mesure de répondre aux exigences de ces nouveaux élèves motivés à apprendre et elle devra également les équiper de manière à ce qu’ils soient en mesure de suivre ce type de formation. En définitive, la meilleure compétition face à l’école privée est la sélection d’élèves dans le secteur public. Sinon, ne parlons plus de coupures dans les écoles privées, gardons-les et vivons avec la compétition.

 

Les écoles vocationnelles

Comme dans n’importe quelle activité, un être humain a besoin d’être stimulé, de se sentir à la hauteur et de trouver son intérêt dans ce qu’il entreprend. Or, l’école qui intègre tout le monde finit par perdre trop de monde. C’est pourquoi, l’école publique ne doit plus être « intégrationnelle », elle doit devenir vocationnelle. Si chaque école publique se spécialisait dans un type de clientèle, il y aurait moins d’inscriptions à l’école privée.

 

La meilleure défensive, c’est l’offensive

Le Parti québécois et Québec solidaire rêvent de couper les subventions aux écoles privées, sans en mesurer l’impact social, économique et surtout, sans en connaître les répercussions éducatives. Ces deux partis, à gauche de l’échiquier politique, optent donc pour une approche défensive, voire protectionniste, face à cette réalité dans le milieu de l’éducation québécoise. Or, au lieu de chercher à abolir un réseau d’écoles qui génèrent des résultats satisfaisants, pourquoi ne pas s’en inspirer pour faire mieux. Il est clair que la démotivation que causera la fermeture de plusieurs écoles privées ne contribuera pas à stimuler la réussite éducative, au contraire, elle l’approchera de son déclin. Pour limiter le transfert des élèves vers le secteur privé, le seul choix dont l’école publique dispose est de sélectionner ses meilleurs élèves et de prouver que le public peut faire mieux que le privé. Par ailleurs, en mettant sur pied davantage d’écoles vocationnelles, le système public offrira des alternatives novatrices et stimulantes aux élèves qui ont besoin d’un environnement adapté à leur profil.

 

Comme bien des entraîneurs, au lieu de stimuler le talent, la gauche demande à tout le monde de se replier et de limiter l’innovation. Pour l’opposition de gauche, il est plus simple de couper que d’innover, ce qui est, à mon avis, une erreur de jugement…

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