Les médias sociaux et la dissociation de la pensée unique

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Source image: Pixabay

Ce texte a été initialement publié sur la page francophone du Prince Arthur Herald

Éric Lanthier

 

 

Plusieurs commentateurs remettent en question la pertinence des médias sociaux (MS) sous prétexte qu’ils sont remplis de « fausses nouvelles », comme si eux-mêmes étaient d’une neutralité absolue. Or, l’émergence des MS ne fait que témoigner du réel besoin de la population : se sentir écoutée.

 

Le droit à l’information positionnée
Dans le merveilleux monde des médias, chaque boîte se range dans une ligne éditoriale. On le sait, La Presse est un journal foncièrement fédéraliste, Le Journal de Montréal oscille entre le nationalisme et le souverainisme et quant à l’équipe franco-montréalaise de Radio-Canada, elle est étiquetée de gauchiste. Qui plus est, une grande partie de l’élite médiatique trouve toujours le moyen de critiquer les simples citoyens qui s’expriment sur les médias sociaux ou sur les plateformes alternatives. Par leur constant jugement défavorable, ils leur disent que les seules opinions valables ne peuvent provenir que de ceux qui font partie du jet-set médiatique, de ceux qui ont un micro ou de ceux qui disposent d’un diplôme universitaire d’études supérieures.

 

Dieu merci! Nous avons accès au sein de la population à des sources critiques qui présentent une autre perspective de l’actualité. Si nous n’avions que les médias traditionnels pour nous alimenter, nous serions en manque d’informations sur la réalité qui nous entoure et limités à n’entendre que les idées soi-disant objectives qu’ils veulent nous inculquer. Or, le public a le droit d’entendre d’autres voix qui analysent les informations à partir des valeurs qui les animent. Ce qui est malsain, c’est de diffuser de l’information sous l’étiquette de la neutralité absolue. Seuls les apôtres de la pensée unique mordent à cet hameçon et acquiescent aveuglément à cette vision du monde.

 

Les analyses et les valeurs
Les réseaux sociaux et les plateformes alternatives permettent aux citoyens de lire et de se mettre au courant d’autres analyses des événements ou des courants de pensée qui correspondent davantage à leurs valeurs. Plus les médias traditionnels s’ouvriront à la diversité d’idées, plus la démocratie grandira en maturité. Le temps est désormais révolu où l’on exigeait de la population la conformité de pensée. Les Québécois ont besoin d’entendre diverses opinions et analyses, de se nourrir de différents points de vue afin d’être en mesure de faire leur propre analyse de l’information et de se former une opinion qui sera la leur. À défaut de quoi, ils deviennent des brebis à la merci du berger le plus bruyant, le plus convaincant et dans certains cas, le plus menaçant.

 

Au Québec, nous avons besoin d’hommes et de femmes qui parlent en fonction de leurs valeurs et non pas à partir d’une ligne éditoriale. C’est justement sur les réseaux sociaux et sur les plateformes alternatives que nous avons accès à ce genre de discours.

 

Auparavant, les opinions étaient fondées sur des valeurs, aujourd’hui, elles se basent sur le point de vue de certains experts de l’information. Depuis la Révolution tranquille, nous avons remplacé nos curés par des prêtres de l’information, et depuis peu, les Québécois recherchent à contextualiser l’information.

 

Les opinions
Dans « l’ancien temps », les personnes qui étaient les plus respectées étaient celles aux cheveux blancs. On disait que, lorsqu’un aîné meurt, on perd une encyclopédie. De nos jours, ce sont les présumés membres de l’élite qui ont le droit d’élaborer des opinions et de les transmettre. Le jugement de celui qui n’en fait pas partie est nul. Quoi qu’il en soit, la prolifération récente de réseaux d’opinions prouve que la population est en train de faire une indigestion de la pensée unique.

 

Outre les avis sur le divertissement, les points de vue dominants, véhiculés par les médias traditionnels, reflètent de moins en moins ceux de la population québécoise. Alors, il n’est pas étonnant qu’elle se tourne vers des sources qui lui offrent d’autres visions du monde. Certains journalistes vont jusqu’à mettre en garde la population contre le danger de l’augmentation de ces réseaux alternatifs. Nous soupçonnons que ces mises en garde ne sont pas toujours empreintes d’objectivité.

 

Une redéfinition de la démocratie
Je suis convaincu que la bonne information doit exister. Je ne crois vraiment pas que les médias traditionnels doivent disparaître. Ce que je veux dire, c’est que grâce aux plateformes alternatives et aux médias sociaux, les médias traditionnels n’ont plus le choix, ils doivent se moderniser. Ils ne peuvent plus imposer leur perspective comme étant la vérité absolue, comme ce l’était avant l’émergence de ces nouveaux canaux de communication.

 

Ces autres canaux amènent l’Occident à vivre un renouveau démocratique. De plus en plus de gens s’expriment, et le panorama politique se diversifie. Au Québec, deux seuls partis en alternance ne suffisent plus. Les Québécois en ont ras le bol d’entendre des discours creux et insipides dictés par des professionnels de la politique. Ils en ont assez d’être contraints à des lois qui ne font que réduire le pouvoir citoyen.

 

C’est clair, les plateformes alternatives et les réseaux sociaux dérangent ceux qui, en fait, ont besoin de se faire remettre à l’ordre! Certes, les médias traditionnels possèdent l’information. Par contre, ils doivent comprendre qu’ils ne possèdent plus le monopole de l’analyse. C’est au bon peuple d’établir si une orientation politique lui convient ou non. Ce n’est pas aux médias traditionnels de le déterminer pour lui. Ces nouveaux réseaux sociaux et plateformes donnent à la population le pouvoir de s’exprimer et de remettre en question ceux qui tentent de nous rallier à la pensée unique.

 

De un, ces nouveaux médias contribuent à ce que la population puisse débattre sainement des enjeux qui la concernent. De deux, ils nous amènent à soustraire de l’imposition de la pensée unique. Grâce à ces lieux de discussion et de réflexion plus ouverts, les Québécois peuvent enrichir leur compréhension de l’actualité, libérer leurs frustrations et informer les décideurs qu’ils ne partagent pas leur point de vue. Pour bien des citoyens, ces nouveaux réseaux deviennent des lieux de rencontre où ils se sentent écoutés, voire même accueillis. C’est pourquoi, je crois fermement que les réseaux sociaux sont désormais essentiels dans une démocratie; ils contribuent à maintenir le gouvernement connecté à l’électorat et non l’inverse.

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