Le port de signes religieux et la crainte de l’envahisseur

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Source: Freepik

\ auteur: Zurijeta

Ce texte a été initialement publié sur les pages francophones du Prince Arthur.

Le port de signes religieux n’est pas la source du problème. En vérité, la limitation de cette liberté provient de la crainte de l’envahisseur.

Le récent sondage de Crop\Radio-Canada sur l’interdiction du port des signes religieux pour les personnes en autorité et du maintien du crucifix dans le Salon bleu révèle que les Québécois ont peur de perdre leur identité. La solution ne se trouve certainement pas dans la répression mais bien plutôt dans la valorisation de notre propre patrimoine. Qu’est-ce qui alimente cette peur de l’autre au point de restreindre ses libertés fondamentales? Elle provient du sentiment de l’invasion.

L’envahisseur et la démographie

La baisse démographique des Québécois de souche n’est pas d’hier. Pendant des décennies, elle ne causait pratiquement pas de problème pour le commun des mortels. Or, depuis le 11 septembre 2001, une prise de conscience douteuse s’est infiltrée dans l’imaginaire des Québécois. Qu’allons-nous devenir en 2050 quand, théoriquement, les Québécois de foi musulmane deviendront majoritaires au Québec? La crainte de l’envahisseur s’est donc emparée de nous, et nous avons voulu freiner l’ardeur de ces arrivants. Pourquoi? Parce que leur identité passe par des signes visibles : un vêtement. En plus, celui-ci rappelle la soumission de la femme. Un concept qui détonne aujourd’hui face aux valeurs occidentales.

L’envahisseur et l’assimilation

Cette peur de l’envahisseur est nourrie par une résistance à l’assimilation. Évidemment, pour une population historiquement judéo-chrétienne, la crainte d’être assimilée à la culture musulmane fait peur, spécialement lorsque son mode de vie comporte des restrictions alimentaires, relationnelles, vestimentaires et sexuelles. Pour empêcher l’influence de cette culture, le réflexe est de vouloir restreindre la liberté de ses adhérents. D’une part, ces restrictions les obligent à vivre comme « nous » et d’autre part, elles forcent les intégristes parmi eux à considérer de s’installer ailleurs. Réduit à sa plus simple expression, la réaction des Québécois est d’assimiler l’immigrant avant qu’il les assimile.

L’envahisseur et l’espace vide

En fait, les familles et les communautés qui affichent leurs croyances par des signes visibles sont menaçantes pour un bon nombre de Québécois parce que ceux-ci souffrent du syndrome de la chaise vide. Non seulement, ils ne font pas suffisamment d’enfants pour maintenir leur poids démographique, les descendants des colons de la Nouvelle-France sont représentés par des personnes qui prônent soit le multiculturalisme, soit le laïcisme. Les partisans du premier modèle sociétal sont accusés par ceux du deuxième de dénaturer notre identité et notre culture. Résultat, les Québécois sont coincés entre choisir un mélange de toutes les cultures ou une identité occidentale. Pendant cette longue tergiversation, rien n’est entrepris pour l’édification de notre identité. Elle vacille entre une identification à la diversité et une assimilation aux valeurs occidentales.

Le rejet du multiculturalisme et de l’occidentalisation

Actuellement, cette pensée binaire ne laisse aucune place à la valorisation de notre identité québécoise. En ayant ces deux seules options, le multiculturalisme ou l’occidentalisation, le Québécois vit une crise identitaire majeure. D’un côté, il ne se reconnait pas dans la diversité et de l’autre, il ne se distingue pas du reste du monde occidental. La culture prônée en Europe ou en Amérique du Nord déteint sur le mode de vie des Québécois. D’un côté et de l’autre de l’Atlantique, comme du Canada au Mexique, c’est de plus en plus du pareil au même.

Un appel à la liberté

Non seulement la laïcisation de la culture désincarne le Québec, elle amène notre nation à imiter le modus operandi des pays intégristes. Je m’explique. Beaucoup de Québécois dénoncent l’intégrisme de la Somalie, où les musulmans n’ont pas le droit d’adhérer au christianisme. Ces mêmes Québécois déplorent que des miliciens chiites de Bassorah en Irak aient fait des menaces de mort auprès de jeunes femmes non voilées. On les décrie parce qu’ils enfreignent la liberté individuelle. Au Québec, lorsqu’on veut empêcher une femme de porter le voile, on est en train de jouer le même jeu que ces intégristes. En somme, l’intégrisme se trouve dans les deux camps.  Dans les deux cas, on tente d’obliger un peuple à une façon de vivre qui va à l’encontre de sa conscience.

La position de l’ONU

Quant à la pratique religieuse et aux vêtements qui s’y rattachent, l’Organisation des Nations Unies impose que la liberté de manifester ses convictions ne soit restreinte que pour des raisons de sécurité, d’ordre, de santé publique ou de morale. Au Québec, peut-on interdire à une femme de porter un voile si aucun de ces droits n’est menacé? Si le gouvernement opte pour l’interdiction, il fera certainement face à des contestations judiciaires.

La valorisation du patrimoine

Comment sortir de ce cercle vicieux? On le peut, en valorisant notre patrimoine sans l’imposer. La valorisation de notre patrimoine démontre notre respect pour ceux et celles qui ont défriché la Nouvelle-France pour en faire une terre de liberté. Aussi, en valorisant les symboles qui ont marqué notre patrimoine, tels que la crèche, les croix, les crucifix, le harfang des neiges, les célébrations qui découpent notre calendrier, comme Noël, Pâques, l’Action de grâces et la Saint-Jean-Baptiste, les chansons folkloriques et les cantiques traditionnels de Noël qui ont marqué notre histoire et notre culture, nos danses traditionnelles qui nous rappellent nos origines ainsi que nos plats qui nous distinguent, nous rehausserons notre identité.

En associant notre histoire, notre patrimoine et notre ouverture au principe fondamental de la liberté, nous protégerons notre identité tout en acceptant la diversité. En élevant notre patrimoine tout en respectant celui des autres, nous lançons un signal clair aux nouveaux arrivants qu’ils peuvent exprimer leurs croyances en toute liberté sans qu’ils nous les imposent. C’est ce qu’on appelle le respect mutuel fondé sur des balises claires. Ce qu’on choisit de mettre en valeur sur le plan national doit être en lien avec notre patrimoine québécois et notre histoire. Le reste fait partie des libertés individuelles. Ainsi, une femme peut porter le voile, mais le Québec n’imposera pas aux femmes non musulmanes de le porter, tout simplement parce que l’islam ne fait pas partie de notre patrimoine.

Une terre d’accueil

Puisque notre sens de l’accueil et de l’hospitalité est une marque de notre culture, accueillons les immigrants qui désirent vivre sur notre terre de liberté dans le respect de notre patrimoine. Sans imposer notre culture, nos symboles, nos célébrations, nos chants et nos plats, manifestons que la liberté qui nous caractérise a plus de valeur que les restrictions que nous imposent les pays dirigés par des intégristes.

Plus nous seront fiers de notre patrimoine et de notre histoire, plus les nouveaux arrivants montreront du respect pour ceux et celles qui ne veulent pas leur imposer un style de vie qui va à l’encontre de leur conscience. Lorsque le vide créé par l’adhérence à une culture occidentale désincarnée sera remplacé par la valorisation de notre patrimoine et de notre histoire, la crainte de l’envahisseur s’estompera.

N’ayons pas peur de la différence, soyons fiers de qui nous sommes et d’où nous venons.

4 Commentaires

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